États généraux de l’alimentation : 34 ONG dénoncent le quasi-arrêt des aides à l’agriculture biologique

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    Alors que les États généraux de l’alimentation devraient accompagner la transition agricole, 34 ONG mobilisées ont rédigé une tribune pour dénoncer la quasi absence d’aide à l’agriculture biologique. Créatrice en emplois locaux et non délocalisables, capable de réduire l’impact agricole sur le climat et plus résiliente, la bio est une solution d’avenir qui fait déjà ses preuves. Pour répondre aux attentes citoyennes et ne pas céder aux lobbies, les ONG interpellent le gouvernement.  

    Quel secteur économique peut se targuer d’une croissance continue ces dix dernières années, d’un véritable engouement des consommateurs et d’un soutien constant des citoyens ? Sous l’effet des crises systémiques frappant le milieu agricole, l’agriculture biologique connaît un succès qui ne se dément pas. Chaque jour, ce sont 21 fermes qui se sont converties à la bio en 2016. Entre 2001 et 2016, le nombre de fermes produisant une alimentation biologique a triplé, passant de 10 364 à 32 264 ! Et les dernières crises agricoles ont encore amplifié ce mouvement de fond. Les surfaces en bio ont cru de 16 % en 2016 en France.

    Loin de la dépression qui frappe l’agriculture, la bio a donc le vent en poupe. Et c’est heureux car chaque nouvelle étude vient démontrer et confirmer tout l’intérêt de cette pratique agricole. Pour le bien-être des paysans eux-mêmes et de la rentabilité de leur ferme, pour la santé des consommateurs ensuite ; et surtout pour l’eau, l’air, les sols ainsi que la faune et la flore qui ne sont plus perçues comme des « nuisibles » et autres « mauvaises herbes » à éradiquer mais comme des partenaires sur lesquels construire une nouvelle relation au vivant. Plus résiliente, intensive en emplois locaux et non délocalisables, plus rentable économiquement, capable de réduire l’impact agricole sur le climat, la bio est une solution d’avenir qui fait déjà ses preuves. Échaudés par les crises sanitaires à répétition, les consommateurs se tournent toujours plus nombreux vers des produits biologiques, locaux et de saison. Neuf français sur 10 ont consommé des produits bios en 2016 et 15 % en consomment régulièrement.

    Au lendemain de l’ouverture d’États généraux de l’alimentation censés répondre aux attentes citoyennes, le ministre de l’agriculture Stéphane Travert semble avoir cédé aux exigences de certains lobbies œuvrant pour que rien ne change. En effet, la France doit notifier avant fin juillet à la Commission européenne le niveau de financement qu’elle compte prélever dans le « premier pilier » (aides directes à l’agriculture sans souci du mode de production) pour financer le « deuxième pilier » (aides ciblées sur des pratiques plus respectueuses de l’environnement). Or, l’annonce faite jeudi après-midi par le ministre ne prévoit qu’un transfert minimum dont l’essentiel de l’enveloppe est de fait déjà consommé, et sans aucun fléchage spécifique prévu pour financer le développement de l’agriculture biologique dans les trois prochaines années. En l’état, les nouvelles conversions d’agriculteurs vers la bio risquent de tout simplement être stoppées nettes car les enveloppes sont épuisées, et certains agriculteurs déjà engagés en bio pourraient devoir mettre la clé sous la porte ou repartir en « conventionnel ». Il serait ahurissant que la dynamique de transition vers l’agriculture biologique soit bloquée par une irresponsabilité budgétaire et par un manque de courage politique.

    Alors que la bio représente désormais 5,7 % de la surface agricole utile et 7,3 % des fermes françaises avec une forte progression ces deux dernières années, seules 2 % des aides agricoles européennes affectées à la France sont versées aux paysans bio, soit 160 millions d’euros sur 7,44 milliards. Il semble donc que ce sous-financement chronique de la conversion et du maintien des agriculteurs en bio soit encore trop pour les tenants du statu quo !

    Nous ne pouvons comprendre que parallèlement au lancement d’États généraux de l’alimentation, le ministre de l’agriculture envoie un tel signal. Ce serait un faux-départ et une vraie faute politique. Nous demandons instamment au ministre de l’Agriculture de s’engager à flécher 3% supplémentaires du budget du 1er pilier vers le second, spécifiquement sur la bio (conversion et maintien), et ce sans préjuger des montants supplémentaires nécessaires pour les autres mesures environnementales et territoriales.

    La bio doit être soutenue à hauteur de ce qu’elle représente. Il est anormal que le mode de production le plus vertueux soit le moins aidé. Les acteurs de la bio sont engagés dans une transition agricole et alimentaire, sans bruit mais avec la ténacité de celles et ceux qui ont l’intime conviction de répondre à une demande dont l’heure est venue. Depuis des décennies les ministres de l’agriculture se sont enfermés dans une cogestion qui les aveugle. Le ministre d’une partie du monde agricole doit devenir celui de la transition agricole et alimentaire. Nous œuvrerons collectivement en ce sens avec ténacité et responsabilité.

     

    Stéphanie Pageot, agricultrice, présidente de la FNAB

    Jacques Caplat, secrétaire général d’Agir Pour l’Environnement

    Audrey Pulvar, présidente de la Fondation pour la Nature et l’Homme

    Laurent Pinatel, porte-parole national de la Confédération paysanne

    Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac

    Jean-François Julliard, directeur de Greenpeace France

    Pascal Canfin, directeur général du WWF France

    Jean-Claude Bevillard, pilote du réseau Agriculture de France Nature Environnement

    Claire Nouvian, présidente de Bloom

    Gilles Bas, secrétaire fédéral de Nature&Progrès

    Hervé Bedouet, président de la FADEAR – réseau de l’agriculture paysanne

    Morgane Creach, directrice du Réseau Action Climat France

    Jérôme Dehondt, porte-parole du Miramap

    Marc Dufumier, président de la Plate-forme pour le commerce équitable

    Sophie Dupraz, directrice du programme Alimentation Responsable et Durable de RESOLIS.

    Gilles Bas, secrétaire fédéral de Nature & Progrès

    David Erhart, agronome, Fédération Artisans du Monde

    Jacques Godard, co-président de SOL

    Dominique Hays, président du Réseau Cocagne

    Gilles Huet, délégué général d’Eau et rivières de Bretagne

    Gilles Lanio, président de l’Union Nationale de l’Apiculture Française

    Martine Laplante, référente agriculture des Amis de la Terre

    Patrick Lespagnol&Bernard Schmitt, co-président du Mouvement d’Agriculture Bio-Dynamique

    Hervé Le Meur, OGM Dangers

    Freddy Le Saux, président de Terre de Liens

    Véronique Moreira, présidente de WECF France

    Birthe Pedersen, présidente d’ActionAid France

    Jean-Christophe Robert, directeur de Filière Paysanne

    Emilie Sarrazin-Biteye, présidente de Max Havelaar France

    Frank Alétru, président du Syndicat National d’Apiculture

    Anne-Françoise Taisne, déléguée-générale du CFSI

    François Veillerette, directeur de Générations Futures

    Dominique Techer, président de Bio Cohérence

    Françoise Vernet, présidente de Terre & Humanisme

     


    Signer la pétition pour sauver le dispositif bio : alaide.agirpourlenvironnement.org

     


    Lire aussi : La société civile se mobilise dans le cadre des États généraux de l’alimentation

    Lire aussi : Comment différencier la Bio, du bio industriel ?

    7 Commentaires

    1. Je me dis qu’il est important que le sol soit rendu à ceux qui y vivent et qui en vivent. Au risque sinon, dans quelques années, de devoir acheter nos fruits, légumes et céréales à des pays pour qui le bio n’est pas qu’un pari sur l’avenir mais une nécessité vitale pour envisager un avenir serein….Des pays dont on se moque aujourd’hui, pourraient bien devenir les plus puissants du monde car devenus incontournables pour faire face à la pénurie alimentaire mondiale….et je leur souhaite de tout cœur

    2. Merci à vous tous. Pour votre mobilisation. Vous aurez aussi celle des consommateurs que nous sommes. Un petit signe particulier à Stéphanie Pageot : nous avons la chance d’apprécier, en Nord Vendée, les excellents produits de sa ferme .

    3. Mais que croyaient donc ceux qui ont voté Macron pour ces élections ? Pas de programme, aucun mot sur l’écologie, un parcours de technocrate et de pantouflage : tout était réuni pour obtenir le pire d’une politique néolibérale.

      Ce système ne pense pas au bien commun, juste à ce qu’il est possible d’obtenir de plus chaque année sur ce que produit la Terre et ce que produisent les hommes.

      Le quinquennat Macron ne fait que commencer, et nous pouvons déjà faire un assez bon constat sur la direction prise : destruction des droits, destruction de la solidarité, destruction de l’environnement. Il est urgent de réagir.

    4. Mesdames et Messieurs les gouvernants,
      UN PEU DE BON SENS SACREBLEU !
      Une nourriture saine et naturelle sans pesticides, sans OGM, sans pollution est source de vie ! vous faut-il plus de maladies chroniques, plus de cancers, plus de dépressions pour vous posez les bonnes questions ? Encourager une agriculture Bio c’est juste encourager la pérennité de notre espèce!

    5. Petite précision : en mars 2017 le processus était déjà en route.
      l’aide d’état à l’Agri-bio se décompose en un aide à l’installation et une aide au maintient. Les orga (FNAB…) ont obtenu un effort sur l’aide au maintient (après la période critique des 3 ans de la certification). La différence est que l’état versait ces aides aux opérateurs syndicaux/associatifs (Ex ARDAB, déclinaison Rhone-Loire de la FNAB signataire), et que maintenant elle est versée aux chambres d’agriculture, qui deviennent opérateurs/distributeurs d’aides avec le peu de moyens supplémentaires et les pertes en ligne que l’on connait. D’où cette impression de moins de subventions. Elle est réelle en plus, en Waukiez-village, avec le transfert du concept « bio et local, c’est l’idéal » en « local » pour la restauration collective des lycées.

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