Un village indien éclairé à l’énergie solaire

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    À Dharnai, un village de 2 400 habitants situé dans l’État du Bihar, dans l’Est de l’Inde, un micro-réseau solaire fournit de l’électricité aux habitants depuis mars 2014.

    village indien
    © DR

     Quand la nuit tombe, vers 18 heures, les lumières s’allument dans Dharnai. Pour les 2 400 âmes de ce village indien, c’est une petite révolution. Deux ans auparavant, ils ne pouvaient compter que sur des lampes alimentées au kérosène ou s’aventurer dans le noir, comme 82 % de la population de l’État du Bihar et 25 % de la population totale de l’Inde. L’installation d’un micro-réseau décentralisé de 100 kW alimenté par des panneaux photovoltaïques a tout changé.

    L’histoire commence en 2012. Greenpeace rencontre alors le ministre en chef du Bihar, Nitish Kumar, pour le convaincre d’adopter les énergies renouvelables pour électrifier les zones rurales. Prudent, ce dernier propose à l’ONG alliée avec le Centre for Environment and Energy Development (CEED), organisation indienne de soutien à l’énergie propre et à l’environnement, de mettre en place un projet test avant de le répliquer si le résultat s’avère concluant. Et c’est à Dharnai que Greenpeace et le CEED décident de tenter l’aventure. « C’est un grand village par rapport à la moyenne des bourgs en Inde. De plus, c’est un espace étendu et complexe. Plus de 90 % de la surface est dédiée à l’agriculture et le centre est composé de commerces, d’écoles et de plusieurs centaines de maisons. Autre spécificité, il est en bordure de l’autoroute reliant Patna, la capitale de l’État. Autant d’éléments qui nous permettaient de déployer un système qui pourrait être répliqué dans n’importe quel village », explique Ramapati Kumar, fondateur du CEED et pilote du projet.

    Une libération !

    Après avoir dimensionné l’installation en fonction des besoins essentiels du village, le réseau solaire financé par Greenpeace – 400 000 euros – est finalement mis en route en mars 2014, sous les applaudissements de la population. Les lampes au kérosène, émettant des fumées toxiques et dont dépendent 82 % des ménages du Bihar pour s’éclairer après le coucher du soleil, ont été abandonnées pour des ampoules DEL.

    « J’aime la façon dont l’électricité a changé mon village. Le plus grand avantage, ici, c’est que nous ne subissons pas de coupure de courant. Même à Patna, vous n’êtes jamais sûr qu’il y aura de la lumière quand vous cuisinez ou quand vous étudiez en soirée. Notre système d’alimentation électrique est fiable et il est géré par nous », se réjouit Santan Kumar, 19 ans. Formé dans le cadre de cette initiative, il est aujourd’hui électricien, et membre du comité de pilotage du réseau mis en place pour transmettre la gestion de l’infrastructure à la population locale.

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    © DR

    Un enthousiasme que partagent les femmes du village auparavant contraintes de se presser pour cuisiner ou d’être sur leurs gardes dès qu’elles s’éloignaient de leur logement la nuit. « Maintenant, les lumières éclairent non seulement les maisons et le quartier, mais l’ensemble du village. Cela crée un environnement de sécurité », constate, heureuse, Gunjan Devi, également élue au comité de pilotage électrique de Dharnai. « Avant, les femmes devaient s’aventurer dans le noir pour aller faire leurs besoins dans les champs. Elles devaient être prudentes à cause des animaux sauvages, des serpents venimeux et des scorpions. Et même surveiller les hommes au comportement malveillant. Désormais, elles peuvent aussi passer plus de temps ensemble le soir  », poursuit-elle, avant d’assurer : « Pour nous, la lumière a été une libération. »

    Un exemple à suivre

    Depuis, divers élus sont venus sur place évaluer le résultat de ce projet test. Le gouvernement du Bihar s’est même engagé à déployer d’autres micro-réseaux solaires avec le soutien de la Banque mondiale. « Nous militons pour que les systèmes d’énergies renouvelables décentralisés deviennent la norme. Nous avons besoin du soutien clair, en matière de réglementation notamment, de l’État régional, pour créer un écosystème favorable à l’investissement privé »,  insiste Ramapati Kumar. Car, pour répliquer l’exemple de Dharnai dans les 19 000 villages privés d’électricité du Bihar, il faudrait réunir 5 milliards de dollars, selon une estimation de Greenpeace.

    Aujourd’hui, Dharnai profite de sa fulgurante mise en lumière. Il a même été rattaché au réseau électrique centralisé, alimenté par… les centrales à charbon de la région. Les habitants peuvent ainsi assurer éclairage et recharge de téléphones sans crainte de coupure, tout en utilisant l’énergie non solaire pour l’électroménager, par exemple. Il leur reste à bien maîtriser leurs usages pour ne pas tomber dans l’excès.

    Quant à l’Inde, elle semble s’engager dans un mix énergétique plus durable. Son Premier ministre, Narendra Modi, a promis d’implanter 100 GW d’installations solaires d’ici 2022, soit une multiplication par 25 de la capacité actuelle. Une ambition qu’il ne reste plus qu’à transformer en actes.

     

     

    Texte : Fanny Costes

    © Kaizen (tiré de Kaizen 27) construire un autre monde… pas à pas

     


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