Slackline : Prendre vie sur le fil

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    Vous pensez que la slackline, ce n’est pas pour vous ? Détrompez-vous ! Cette activité a le vent en poupe et se révèle accessible à qui persévère un minimum. Au final, vous y gagnerez en sérénité et en équilibre. Une vraie belle découverte.

    Chaque week-end, c’est le même rituel. « Du monde à la pagode aujourd’hui ? Je suis en route ! » Quelqu’un poste un message sur le mur du groupe Facebook de l’association Parislack et une trentaine de passionnés réagissent aussi sec. Trois heures plus tard, les arbres du bois de Vincennes se parent de rubans colorés, orange, rouge, vert, bleu. Les lignes se tirent d’un tronc à un autre dans une atmosphère joyeuse et légère. Tout à coup, une sorte de silence s’installe. Les rires et discussions se font plus discrets et les sangles tendues se courbent au fil des pas des équilibristes en herbe. Un spectacle gratuit pour les promeneurs, un moment de méditation pour ceux qui marchent désormais pieds nus sur ces longues sangles larges de 3 à 4 centimètres.

    « Quand on commence, on ne peut plus s’en passer, c’est très addictif », sourit Michel, capuche sur la tête, deux masques superposés sur le nez. À 75 ans, ce retraité aux mille petits boulots est un habitué. « J’ai découvert la slackline il y a quatre ans, en promenant mon chien au bord de ce lac. Au début, je me suis dit que ce n’était pas pour moi, mais quinze jours plus tard, j’ai acheté une sangle dans un magasin de sport pour essayer. Ça a été le meilleur investissement de ma vie ! » Depuis, le retraité se sent comme rajeuni : « Cela m’a tellement transformé. Je me suis redressé, remusclé. Je me sens beaucoup plus en forme qu’avant. Cela m’a aussi apporté davantage de confiance en moi et cela m’a ouvert aux autres alors que j’étais un grand timide. » Le doyen du groupe n’hésite plus à s’adresser aux curieux. Il prend même un malin plaisir à prodiguer ses conseils et initier les nouveaux venus.

    La slackline est parfaite pour améliorer son équilibre et sa proprioception, prévenir les risques de chute chez les seniors et développer l’ensemble de ses muscles posturaux en douceur. ©Véronique Bury

    Moment présent et ouverture

    Car la slackline, c’est aussi un partage, un échange, une ouverture. « Il n’y a pas de clubs, pas de fédération, c’est une pratique qui est encore très libre », rappelle Redouane N’ser, président de Parislack, association qui fédère les slacklineurs parisiens autour de gros projets, organise des évènements et fait rayonner la slackline au-delà du bois de Vincennes. Mais, ici, en ce samedi printanier, Redouane est « un slacklineur comme les autres », il vient « pour le plaisir ». Le plaisir de mettre un pied, puis un autre, sur cette fine sangle, en équilibre, à quelques centimètres du sol et de se recentrer à l’intérieur de soi. « C’est très méditatif », assure le quadragénaire qui a découvert la discipline il y a seulement quatre ans. « Quand tu es sur ta ligne, tu es obligé d’être dans le moment présent. Tu ne peux pas penser à autre chose, tu ne peux pas tricher. Tu dois faire attention à tes mouvements, mais en même temps, tu n’es pas non plus dans le contrôle. Beaucoup de choses se font par réflexe ou acquis à force de marcher sur ces lignes. Comme une connexion avec ton corps. Et un détachement de l’esprit. Tu es concentré, mais tu laisses aller les sensations. »

    À quelques mètres, sur une ligne parallèle, Louna, 23 ans, s’exerce à se redresser de la position assise. Pas facile. Pour autant, la jeune femme, qui a découvert l’activité l’été dernier, l’assure : « Ça s’apprend assez vite, mais il faut être persévérant au début. Personnellement, j’ai dû m’acharner pendant deux week-ends complets avant de réussir à marcher et à rester dessus. » Depuis, Louna s’est acheté sa propre sangle et pratique une fois par semaine au moins. « J’aime bien en faire quand je suis stressée, je trouve que cela m’apaise. » Yannick, 37 ans, est mordu de slackline depuis cinq ans déjà. Ce professeur de musique a eu un véritable « coup de foudre ». « Chacun ici apprend à son rythme, librement, tout en profitant des interconnexions qui se créent. Cela m’inspire beaucoup pour mes cours », lâche-t-il tout en déambulant paisiblement à 1 mètre du sol. De « l’apprentissage libre » à « l’ancrage corporel dans la sangle », Yannick trouve aussi matière à progresser dans sa pratique musicale personnelle. « Je suis très angoissé quand je monte sur scène, et la slackline m’a aidé à vaincre mes peurs. »

    La slackline est apparue aux États-Unis dans les années 1980 au sein d’une communauté d’alpinistes avant de se diversifier et d’arriver en Europe au début des années 2000 ©Véronique Bury

    « Lâcher prise et se lancer »

    Condition physique, gainage, équilibre, confiance, sérénité, les bienfaits de la slackline sont bien plus nombreux qu’il n’y paraît. « J’ai perdu pas mal de poids en m’y mettant », admet même Redouane. « On ne s’en rend pas compte, mais c’est assez physique : on travaille tout le corps quand on est sur une ligne, les bras en l’air pour s’équilibrer. » Quant à la technique, hormis le fait de privilégier le milieu de la sangle pour y grimper plus facilement, « car c’est l’endroit où elle est la plus stable », c’est un peu « chacun la sienne » ! « Le plus important est d’être à l’écoute de son corps et de ses ressentis. Il y a toute l’appréhension à enlever. Donc, si tu es tout le temps à écouter les conseils des autres, au départ, ce n’est pas possible. Il faut réussir à lâcher prise et à se lancer. Et puis, un mec peut très bien te dire de faire le mouvement d’une certaine façon, mais toi, dans ton corps, tu ne le ressens pas comme ça et tu ne pourras donc pas le faire. On a tous un corps différent, une musculature différente et cela réagit donc différemment sur la sangle. Certaines personnes, par exemple, ne sont pas assez souples pour démarrer assis, mais ce n’est pas grave, elles font autrement. On s’adapte et chacun trouve sa façon de slacker. »

    À 60 kilomètres de là, au cœur de la forêt de Fontainebleau, Romain et Sébastien ont installé leurs deux sangles loin de l’agitation des parcs parisiens. Dans le silence de la forêt, ils marchent chacun sur la leur, paisiblement, tels des funambules agiles. « J’en fais quasiment tous les jours dans mon jardin en rentrant du boulot, ça me détend et m’apaise, mais j’aime bien aussi aller tendre ma sangle en pleine nature », explique Sébastien tout en montrant le sac dans lequel loge l’ensemble de son matériel. « C’est pratique, léger et ça ne prend vraiment pas beaucoup de place. » Si bien que lui et son acolyte sont du genre à slacker partout. « Il y a deux ans, on est partis à vélo plusieurs jours avec des potes dans les monts du Cantal et chaque soir, on tendait notre sangle. » Au milieu de paysages magnifiques… Forcément, « c’était magique ! » Une autre façon de vivre la slack.

    C’est aussi une activité idéale pour apprendre à lâcher prise et se reconnecter à son corps. Une sorte de méditation active. ©Véronique Bury

    Et si vous passiez à l’acte ?

    Comment ?

    La slackline est apparue aux États-Unis dans les années 1980 au sein d’une communauté d’alpinistes avant de se diversifier et d’arriver en Europe au début des années 2000. Elle se pratique sur une sangle de 15 à 30 mètres de long pour 2,5 à 5 centimètres de large. On trouve aussi la longline pour des distances plus longues, de 30 à 80 mètres, la highline pour des hauteurs bien plus élevées (100 à 150 mètres) ou la jumpline, plus acrobatique.

    Pour qui ?

    La slackline présente peu de contre-indications à partir du moment où elle est pratiquée dans un environnement sécurisé, à quelques centimètres du sol. « La seule chose que l’on risque, c’est une mauvaise chute », lâche le président de l’association Parislack.

    Où et à quel coût ?

    La slackline a l’avantage d’être une activité libre qui peut se pratiquer partout et à n’importe quelle heure de la journée dès lors que l’on possède son équipement et que l’on a deux arbres solides à proximité. Pour autant, on vous conseille de commencer en rejoignant des pratiquants via les réseaux sociaux (groupe Slackline France). Non seulement c’est gratuit, mais ces bénévoles vous apprendront à installer correctement votre propre matériel une fois que vous aurez investi.

    Avec quel équipement ?

    Pas besoin d’acheter une tenue de sport adaptée : un pantalon et un t-shirt confortables feront largement l’affaire ; il vous faudra cependant investir à terme dans votre propre sangle. Comptez entre 30 et 50 euros la sangle de 15 à 25 mètres. Quant à la largeur, si les sangles de 5 centimètres de large sont plus rassurantes pour les enfants ou les débutants, il est totalement possible de débuter sur des sangles de 2,5 centimètres de large. Pieds nus de préférence, ou avec des petites chaussures souples et plates si vous êtes vraiment frileux.

    Quels bienfaits ?

    La slackline est parfaite pour améliorer son équilibre et sa proprioception, prévenir les risques de chute chez les seniors et développer l’ensemble de ses muscles posturaux en douceur. Cerise sur le gâteau, c’est aussi une activité idéale pour apprendre à lâcher prise et se reconnecter à son corps. Une sorte de méditation active.


    POUR ALLER PLUS LOIN

    • Théo Sanson, Slackline. S’initier et progresser, Glénat, 2016

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