POC, POC, POC, le monde de demain frappe à la porte

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    Réunissant pendant cinq semaines un groupe de « créateurs de solutions » pour fabriquer douze objets innovants sur le thème « zéro déchet, zéro carbone », la première étape du camp d’innovation POC21 – « proof of concept » en anglais, preuve de faisabilité –, s’est achevée avec succès les 19 et 20 septembre par une exposition publique.

    © ekkkans sur Instagram
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    Scène insolite dans la campagne francilienne : à droite, le château de Millemont, demeure élégante et désuète habituée à héberger des tournages de films historiques. À gauche, un dôme géodésique qui accueille douze prototypes open source, c’est-à-dire libres de droits,  construits sur place par leurs inventeurs respectifs, qui ont été sélectionnés parmi près de deux cents candidatures.

    Alors qu’ils présentent leur projet aux premiers visiteurs, les participants rivalisent d’efforts pour mettre l’accent sur la simplicité, la réplicabilité, l’impact environnemental ou social de leur modèle. Derrière la passion qu’ils sont impatients de partager, les traits des inventeurs sont tirés, leur teint pâle : naviguant entre les quatre ateliers de la résidence – bois, métal, électronique et modélisation 3D –, leurs dernières nuits ont été courtes voire blanches et ils n’ont pas ménagé leur peine pour exposer des modèles opérationnels.

    Jason Selvarajan – inventeur de Showerloop, une douche qui filtre l’eau en temps réel –  avoue qu’il n’a pas visité son sac de couchage depuis plusieurs jours : il a dû remettre en état sa cabine de douche dont un pan en verre avait cédé. « La semaine dernière, j’ai dormi deux heures par nuit », révèle à son tour Mauricio Cordova, créateur de Faircap, qui a planché dur sur ses filtres, lesquels couplés à des bouchons de bouteilles en plastique peuvent filtrer les produits chimiques ou les bactéries.

    © autodesk sur Instagram
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    Marqué par l’épidémie de choléra qui a fait 10 000 victimes dans son pays natal, le Pérou, en 1991, ce diplômé d’école de commerce et ancien stagiaire à Wall Street est habité depuis toujours par l’envie de « trouver des solutions aux grands problèmes et avoir un impact ». Fabriquer des filtres à moins d’un euro la pièce, alors qu’un milliard de Terriens n’ont pas accès à l’eau potable rentre dans les deux critères.

    « Beaucoup d’informations sont disponibles sur la toile, y compris les travaux de certains scientifiques, explique l’autodidacte. C’est ainsi que j’ai appris que le carbone absorbait les produits chimiques, et que la céramique pouvait filtrer les bactéries. »

    La technologie utilisée par Mauricio existe depuis plusieurs décennies. Elle est utilisée dans l’industrie, mais méconnue du grand public : « Les gens sont convaincus que c’est compliqué, mais c’est très simple de filtrer l’eau », affirme Mauricio, qui démonte devant nous un filtre à produits chimiques : deux capsules imprimées en 3D et séparées par une couche de grains de carbone. En mettant la méthodologie complète en libre accès, Faircap permet à ceux qui disposent d’une imprimante 3D de fabriquer eux-mêmes les filtres les plus simples. Le Péruvien espère également lever 10 000 euros par le biais d’une campagne de financement participatif pour lancer la fabrication des Faircaps : « Elles devraient se vendre pour 15 euros l’unité, évalue Mauricio. Et pour 20 euros, l’acheteur pourrait en offrir une à une famille africaine. » Dans un second temps, Mauricio espère trouver un partenariat avec une fondation pour fabriquer ses filtres à plus grande échelle et les envoyer là où les besoins sont les plus intenses.

    Décrivant le POC21 comme « les meilleures semaines de [s]a vie », Mauricio Cordova a bénéficié comme les autres participants de l’effet accélérateur de la résidence. Entre l’entraide et les soutiens ponctuels d’experts et mentors sélectionnés par l’organisation, les modèles qui avaient permis aux uns et aux autres de faire partie des heureux sélectionnés se sont perfectionnés au fil des cinq semaines : le stockage énergétique de l’éolienne s’est amélioré, pendant que SunZilla diversifiait les débouchés de l’énergie produite par ses panneaux.

    « Grâce au partage de connaissances, j’ai réussi à diviser par deux le prix de revient de ma cabine de douche », se félicite également Jason Selvarajan.

    Autour de leur thématique commune de la purification de l’eau, une collaboration plus pérenne entre Mauricio Cordova et lui est envisagée. De façon plus globale, l’un des enjeux de réussite de cette résidence imaginée par OuiShare et le collectif Open State est de capitaliser sur cette dynamique de groupe : une plate-forme virtuelle devrait être créée pour que les projets puissent continuer à collaborer entre eux, bénéficier d’expertises extérieures selon les principes de l’open source, mais également permettre au grand public d’acquérir des exemplaires des objets.

    En attendant, certains des prototypes devant lesquels ont défilé 1 500 curieux les 19 et 20 septembre au château de Millemont seront de nouveau visibles dans les semaines à venir. Le POC21 sera présent à Alternatiba Paris place de la République les 26 et 27 septembre, et potentiellement au Grand Palais du 4 au 10 décembre pour Solutions COP21, ainsi qu’au Bourget pendant le sommet. Et si le chef de l’État n’a pu se rendre au château de Millemont comme il en fut question à un moment, la visite d’Axelle Lemaire, la secrétaire d’État chargée du Numérique et son enthousiasme pour le projet pourraient déboucher sur une exposition d’un mois en octobre dans un lieu parisien à déterminer. Barcelone, Bruxelles et Berlin sont également intéressées.

    12 modèles vertueux à répliquer sans modération

    © nicolasloubet sur Instagram
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    – Biceps cultivatus. Coquette et sophistiquée, cette cuisine en trois modules propose de remplacer le pétrole par l’huile de coude et un peu d’astuce. Le premier module réplique l’atmosphère d’une cave pour conserver fruits et légumes, le deuxième allie un lombricomposteur à une unité de production bioponique d’aromates, alors qu’un pédalier permet d’actionner un batteur à œufs : ingénieux.

    – L’éolienne à 30 € est ultrasimple à réaliser et donne envie de sortir sa boîte à outils pour en installer une dans son jardin. « On a utilisé des panneaux métalliques récupérés sur des imprimantes, confie l’un des porteurs du projet. Il suffit de trois heures pour les découper et les monter. » Sous un vent qui souffle à 60 km/h, le prototype peut délivrer 1 kW.

    – Bicitractor : ce tracteur à pédales permet aux petites exploitations agricoles, et plus particulièrement maraîchères, d’effectuer différentes tâches agricoles sur une profondeur maximum de 5 cm. Avant le POC21, le premier prototype a été réalisé en Californie avec des matériaux de récupération pour 50 dollars. Une propulsion électrique est désormais à l’étude.

    – Showerloop filtre l’eau de la douche en temps réel, réduisant non seulement la quantité d’eau utilisée, mais également l’énergie nécessaire pour la chauffer selon un facteur de 5 à 10.

    – Faircap est une capsule imprimée en 3D pour un prix de revient d’un euro, filtrant les eaux polluées et adaptable sur la plupart des bouteilles en plastique.

    – OpenEnergyMonitor permet de surveiller la consommation et la production d’énergie d’un bâtiment en temps réel, par le biais d’un petit terminal électronique.

    – SunZilla est un générateur portable opérant à l’énergie solaire, qui peut se substituer aux modèles actuels, polluants.

    – Nautile est une bouilloire biomimétique élégante et sophistiquée, qui s’inspire de quatre éléments de la nature pour optimiser la quantité d’eau chauffée et l’énergie utilisée.

    – Vélo M2 crée des modules adaptés au vélo-cargo XYZ, pouvant alimenter une sono ou une kitchenette mobiles.

    – SolaRose utilise un système de miroirs pour concentrer les rayons du soleil et produire de l’énergie thermique de façon locale et autonome.

    – OwnFood est une serre connectée alliant permaculture et aquaponie pour un rendement élevé. Elle se destine aux particuliers.

    – Aker propose des modules de culture et d’élevage en bois naturel, destinés à l’agriculture urbaine.

     

    Par Cécile Soler

     


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