L’esprit vacant – désintéressé, réceptif donc renouvelé –, nous expérimentons un autre rapport au temps. Avec son dernier essai Être vivant, méditer, créer, Philippe Filliot envisage l’expérience méditative comme source de création, et inversement.
Méditer, créer, des expériences libératrices face aux cultes de la vitesse
Dominance des valeurs productivistes, omniprésence de l’information, de la publicité : les bruits de la société contemporaine – société « en crise », nous répètent inlassablement les politiques et les médias – ne nous facilitent pas la tâche dans la découverte de nous-même. Nous évoquions ici-même l’importance de se débarrasser du superflu matériel pour mieux vivre. Similairement, l’ouvrage Être vivant, méditer, créer souligne l’importance de se libérer des (trop nombreuses) sollicitations extérieures pour laisser place à la pensée créatrice. Et vivre pleinement.
Professeur d’arts plastiques, chargé de cours sur la spiritualité contemporaine à Paris-VIII, Philippe Filliot pratique aussi « l’art du yoga ». Passionné par les artistes et penseurs pour qui l’existence constitue en elle-même l’œuvre suprême, il cite dans cet essai Oscar Wilde, Michel Foucault, Gilles Deleuze, et, à de multiples reprises, Jiddu Krishnamurti.
« La fin de la pensée est le commencement de la création. » – Jiddu Krishnamurti
Adopter quotidiennement une posture créative, laisser venir des pensées neuves – Krishnamurti parlait de déconditionnement – permet donc d’accepter le changement, d’accéder au soi, par la création permanente du soi. « Le chemin est le but », ne cessent de répéter les sages d’Orient évoqués par Philippe Filliot. Ainsi, ce dernier appréhende la méditation non pas comme une évasion mystique, mais bien comme une pratique pour garder les pieds sur terre : « Méditer ne consiste pas à léviter dans l’Idéal, mais, bien au contraire, à atterrir dans le réel. »
Créer, c’est méditer ; méditer, c’est créer
Regardons au-delà des conventions ; déplaçons les perspectives : si la méditation est une démarche artistique, l’art ne serait-il pas une expérience méditative en puissance ? Selon Philippe Filliot, « l’artiste véritable n’est pas seulement celui qui maîtrise les moyens d’expression ou les procédés techniques, mais celui qui sait suspendre provisoirement son activité pour se rendre parfaitement disponible et réceptif. Détaché des choses, l’esprit vacant, il est ainsi ouvert à tout ce qui advient. » Pratiqués conjointement, l’art et la méditation permettraient alors d’« unir le dedans et le dehors, le moi et l’univers », et d’accéder à la paix intérieure. À l’origine de cette vision, nous retrouvons des artistes tels que Marcel Duchamp :
« Mon art serait de vivre ; chaque seconde, chaque respiration est une œuvre qui n’est inscrite nulle part, qui n’est ni visuelle ni cérébrale. »
Ou encore le Britannique Kenneth White, qui voit l’activité artistique comme une « pratique étendue » demandant une intense présence au monde réel :
« La pratique poétique est un grand yoga. »
Happée par la société de la vitesse, notre intériorité demande beaucoup de temps et d’attention, d’introspection et de voyages. Être vivant, méditer, créer nous invite simplement à prendre quelques minutes, chaque jour, pour lever les voiles… Cap vers l’humanité éveillée.
Simon Beyrand
© Kaizen, construire un autre monde… pas à pas
Actes Sud Sciences humaines,
Collection le Souffle de l’esprit
Mai, 2016 / 11,5 x 17,0 / 160 pages
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Et il parait aussi que cela réduit le risque terroriste, la criminalité et les conflits,
vraiment ce dont on a besoin en ce moment:
http://www.societestrategie.fr/pour-reduire-le-risque-terroriste-la-criminalite-et-les-conflits-une-technologie-de-defense-fondee-sur-le-champ-unifie-par-charles-genaudeau/