Living School : devenir éco-citoyens

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    Qui ne s’est jamais dit en découvrant des solutions à nos problèmes écologiques, sociaux ou économiques : « On devrait apprendre ça à l’école » ? Vous en avez rêvé, Living School l’a fait…

    L’histoire commence dans une entreprise de jeux vidéo où la jeune Caroline Sost, diplômée d’une grande école de commerce, décide de donner une nouvelle orientation à sa vie. En plein bouleversement intérieur, elle s’engage dans une formation nouvelle : un Master pour le Développement du Leadership Ethique. Le programme dure trois ans et s’ouvre sur un constat de l’état du monde : dégradation écologique, pauvreté, malnutrition, crise économique… Caroline tombe de haut. Elle s’intéresse alors particulièrement à l’éducation à travers le monde et, là non plus, les indicateurs ne sont pas brillants. « Je ne pouvais plus faire comme si ça n’existait pas » se souvient-elle. Plutôt que de déplorer la situation, elle monte un projet d’école alternative qui lui semble répondre aux deux grands besoins de la génération à venir : réparer la planète et les humains. Depuis plusieurs années elle est très investie dans ce champ : bénévole durant quatre ans en centre social, où elle proposait du soutien scolaire aux enfants de Belleville (Paris) et remplaçante dans des écoles privées catholiques, elle parfait son expérience avec une maîtrise en sciences de l’éducation.

    Living School naît à Paris dans le 19ème, en septembre 2007, grâce à quelques investisseurs que la jeune femme inspire par sa détermination et son enthousiasme. Le projet est axé sur la formation à l’écocitoyenneté et au « savoir-être » (la capacité à vivre en harmonie avec soi et les autres). En complément, l’école propose une formation bilingue basée sur des cours en anglais (dispensés par des anglophones) pendant la moitié de la journée. Autour de cette colonne vertébrale s’organisera tout le programme traditionnel.

    Apprendre à se sentir bien

    Peu à peu les pièces se mettent en place. Côté épanouissement personnel et relationnel, Caroline introduit des éléments de la communication non-violente (CNV) et de la psychologie de l’évolution. Le travail consiste à faire prendre conscience aux enfants de leurs qualités – leur potentiel – et dans le même temps, d’arriver à gérer leurs émotions, sans s’identifier à eux. Lorsqu’un enfant se laisse déborder par la colère ou le ressentiment, il peut aller décharger ses émotions sur le punchingball ou le coussin de colère et se recentrer en respirant, méditant ou en prenant soin du petit jardin zen. Dès qu’il se sent mieux il peut réintégrer la classe. La méthode s’applique aussi aux enseignants qui y sont parfois encouragés par leurs élèves. « Pour nous il est fondamental d’être exemplaires. C’est la seule façon de transmettre. Nous aurons beau leur dire de communiquer avec bienveillance, de se respecter eux-mêmes et de respecter les autres, si nous ne le faisons pas nous-mêmes, cela ne marchera pas ! Pour autant, ils voient que nous avons aussi le droit de ne pas être parfaits et de craquer de temps en temps… ».

    Afin d’optimiser le bien-être de chacun et la cohésion du groupe, chaque journée commence par un rassemblement en cercle et un éveil corporel, animé par un élève dès la moyenne section.

    Apprendre grâce à l’enthousiasme

    Puis la journée se déroule en suivant tous ses éléments du programme : orthographe, mathématiques, langues… L’apprentissage se veut le plus concret, participatif et ludique possible. Il s’agit de s’appuyer sur l’enthousiasme et l’élan des enfants pour leur permettre d’enregistrer les connaissances. Apprendre à compter se fait par des manipulations afin de ne pas rester dans l’abstraction. La découverte de l’orthographe par le jeu des mots flash inscrits sur une ardoise, montrés une seconde à peine et qu’il faut s’amuser à reconstituer. La lecture est enseignée dès la moyenne section avec la méthode des alphas, très ludique elle aussi (méthode basée sur le jeu et le conte pour associer lettres et sons). En grande section la majorité des enfants lisent en français, ce qui leur permet de commencer à apprendre l’anglais en limitant les risques de confusion. Les parents sont enthousiastes mais attentifs. Qui dit que ces méthodes, si positives soient-elles, permettront à leurs bambins d’acquérir les savoirs nécessaires ? Pour s’en assurer, l’équipe de Living School met en place un système d’évaluation, dans les conditions de l’Education Nationale, au retour de chaque période de vacances. Ni en maternelle, ni en primaire les enfants ne sont notés. Ils sont évalués selon trois critères : compétences acquises, en cours d’acquisition, non acquises. Les résultats rassurent tout le monde. Et si ce n’est pas le cas, les parents le font savoir. C’est notamment ce qui s’est passé en anglais, où les résultats ont été jugés décevants venant d’un établissement proposant une immersion en anglophonie la moitié du temps. L’équipe reçoit les critiques (lorsqu’elles leur semblent justifiées), parfait sa méthode et obtient des résultats. La petite fille dont les parents déploraient le faible niveau d’anglais est aujourd’hui parfaitement bilingue.

    Apprendre l’écocitoyenneté

    Le volet de l’écocitoyenneté, même s’il est inscrit dans le projet de l’école, ne démarre réellement que la deuxième année avec les enfants. Quand on lui demande ce qu’il voudrait faire plus tard, Eliott, élève de maternelle, répond « policier de la planète pour apporter à manger à tous ceux qui ont faim ». « Les enfants veulent déjà agir mais on leur répond toujours d’attendre d’être plus grands. Nous pouvons leur proposer de faire quelque chose dès aujourd’hui, raconte Caroline Sost. Nous avons travaillé avec Action Contre la Faim, peint des assiettes qui ont été vendues et ont permis de préserver sept enfants de la faim pendant un an. La graine a été plantée. » Cette année, les enfants ont « adopté » 21 pandas en partenariat avec le WWF. Parallèlement, des cours sur les leaders éthiques (Mandela, Rosa Park, Gandhi, Wangaari Mathai…) sont dispensés pour inspirer les enfants dans leurs démarches futures. Des exercices de visualisation leur permettent de se projeter dans des métiers qui leur plaisent et seront utiles aux autres et à la planète.

    Par ailleurs l’école s’engage aussi dans cette voie avec une cantine 100% bio, un système de recyclage, la monnaie de troc mise en place dans l’école (le Living) permettant aux enfants d’échanger de vieux objets ou livres entre eux, ou encore l’AMAP instaurée pour les familles de l’école.

    Un modèle en chemin

    Aujourd’hui, Living School compte 83 élèves de la petite section de maternelle jusqu’au CM1. L’école a cheminé avec eux : les classes se sont ouvertes au fur et à mesure que les enfants ont grandi. Désormais, la présentation aux parents est radicale : « Si vous êtes allergiques à la psychologie, au travail sur soi, à l’écocitoyenneté, ne venez surtout pas chez nous ! » leur répète la directrice. Des journées portes ouvertes sont organisées, au cours desquelles certains parents témoignent du parcours que l’école leur a permis d’effectuer personnellement, notamment lors des ateliers proposés en soirée pour les aider à surmonter les difficultés rencontrées avec leurs enfants. Ce parcours ne fut possible que parce qu’ils adhéraient pleinement au projet pédagogique, ce qui ne fut pas toujours le cas par le passé, lorsque les nouveaux arrivants n’étaient pas suffisamment renseignés sur la structure.

    La transmission vers l’extérieur se développe également. Tous les ans, en mai, une formation de deux jours est proposée aux enseignants de l’Education nationale. Cette année, 30 participants sont venus de France et d’Europe (Belgique, Allemagne, Suisse) et ont commencé à dupliquer les méthodes de Living School.

    Le problème principal reste financier. Lancer un projet aussi innovant impliquait de le faire dans le privé. Et pour faire fonctionner la petite entreprise, la scolarité coûte cher (600 euros par mois). Or, l’intention de Living School est de s’adresser au plus grand nombre et d’offrir une réelle mixité sociale. Pour ce faire, l’école est en train d’organiser un système de bourses financé par des mécènes. Avant, peut-être, d’être reconnue par l’Education Nationale. De quoi donner du grain à moudre à Caroline Sost et son équipe pour les années à venir !

    Texte : Cyril Dion

     

    1 COMMENTAIRE

    1. C’est passionnant.Bravo.mes filles sont allées à l’école Montessori.je retrouve chez living school les mêmes préoccupations.je vais leur faire connaître lEcole pour mes petits enfants

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