Jane Goodall : celle qui murmurait à l’oreille des chimpanzés

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    Fabrication d’outils, communication, conscience de soi… Autant de facultés que l’on croyait réservés à l’être humain. Et pourtant… Dans les années 1960, la primatologue et éthologue Jane Goodall révolutionne les connaissances scientifiques autour des hommes et des primates en observant des chimpanzés sauvages de Tanzanie. Dans son documentaire « Jane », le réalisateur Brett Morgen a retracé les premiers pas de cette femme devenue une icône de la défense de la biodiversité.

    Près d’une rivière ruisselante, des insectes fourmillent dans les feuillages et un serpent immobile se fond dans le décor. En levant la tête, les oiseaux, eux, virevoltent dans les airs. À l’instant où, entre ciel et terre, des chimpanzés donnent vie à des arbres centenaires en se balançant de branche en branche avec élégance. Bienvenue dans la région sauvage de Gombe, à l’ouest de la Tanzanie.

    C’est ici, en 1960, que la jeune Jane Goodall, alors âgée de 26 ans, débutera la plus longue mission scientifique de l’histoire qui continue encore aujourd’hui : l’étude des comportements des chimpanzés à l’état sauvage. « Petite, je voulais vivre avec les animaux dans la jungle et écrire des livres sur eux », confie-t-elle dans le documentaire « Jane », de Brett Morgen.

    À 26 ans, Jane Goodall commence son étude marquante sur les chimpanzés de Tanzanie en s’immergeant dans leur habitat telle une voisine plutôt qu’un observateur lointain ©CaptEcrYoutube (Bande annonce de « Jane »)

    À la demande du célèbre paléontologue Louis Leaky, la jeune femme est envoyée en Afrique sans aucune expérience ni formation scientifique, simplement armée d’une paire de jumelles, d’un cahier de notes et d’une patience exemplaire pour étudier le comportement des chimpanzés.

    « J’avais l’impression d’observer nos semblables »

    Après cinq mois d’attente et de solitude, Jane Goodall capte enfin l’attention d’un primate qui ne s’enfuit pas en sa présence. Elle le surnomme David Greybeard, reconnaissable par les poils gris sur son menton. Elle observe qu’il utilise une brindille pour dénicher des termites entassés dans des nids souterrains. Cette découverte fait rapidement le tour du monde. La fabrication d’outils n’est plus l’apanage de l’homme mais s’étend bien jusqu’aux grands singes.

    Grâce à ce premier contact, Jane gagne la confiance de toute une tribu de chimpanzés et peut observer de plus près leurs comportements sociaux. Compassion, empathie mais aussi jalousie, colère et même sens de l’humour… Chaque primate semble avoir sa personnalité. « J’avais l’impression d’observer nos semblables », raconte-t-elle. Autant de capacités cognitives qui ébranlent la communauté scientifique du monde entier et redéfinit la relation entre les hommes et les grands singes.

    « Avec pratiquement aucun soutien de la communauté scientifique alors dominée par la gente masculine, cette femme de 26 ans, sans formation universitaire, est allée seule dans la jungle tanzanienne et y a fait des découvertes qui ont changé notre façon de voir les animaux, de nous voir et de voir le monde. Jane Goodall est la preuve vivante que la passion et la conviction peuvent rendre une personne immortelle » [Bryan Burk, producteur]

    Son histoire d’amour avec Hugo van Lawick  

    Loin de mettre en lumière l’icône et la reconnaissance internationale de Jane Goodall, c’est davantage un portrait intime d’une jeune femme passionnée que dresse le réalisateur Brett Morgen dans le documentaire « Jane ». Un défi relevé grâce aux images et plans d’une qualité exceptionnelle tournés par le reporter animalier, Hugo van Lawick, en 1962. Soit plus de 140 heures de films d’archives stockées dans les locaux de National Geographic que le réalisateur américain a dû restaurer.  

    En 1962, Hugo van Lawick (au centre) est envoyé par National Geographic pour faire un reportage sur les travaux de Jane Goodall et la filme en action. Ils vivront une idylle pendant 10 ans et auront un bébé surnommé Grub. ©CommonsWikipedia

    « Il ne fait aucun doute que Hugo van Lawick [décédé en 2002] était, en son temps, le plus grand photographe de la nature », confiait Brett Morgen à National Geographic. « J’ai fait des films toute ma vie, en commençant par des films 16 mm et je ne saurais décrire les difficultés auxquelles Hugo a dû faire face en Afrique, en filmant en 16mm couleur, en 1962. »

    Au milieu des primates, naît alors une histoire d’amour entre Jane Goodall et Hugo van Lawick. Une union qui se concrétise par leur mariage en 1964 suivi de la naissance de leur fils, Hugo Jr surnommé Grub.

    L’Institut Jane Goodall

    En 1977, la primatologue fonde l’Institut Jane Goodall et ouvre un centre de recherche dans le Parc naturel de Gombe où des étudiants du monde entier viennent apprendre à ses côtés. Anéantie lorsqu’une épidémie de poliomyélite touche les chimpanzés, causée, semble-t-il, par le contact humain dans une autre région d’Afrique, Jane Goodall réalise l’empreinte néfaste que peut avoir l’homme sur leur milieu naturel des animaux. Elle décide alors de consacrer le reste de sa vie à défendre la faune et la flore.

    Dans ses livres et ses discours, Jane Goodall, âgée aujourd’hui de 83 ans, souligne l’inter-connectivité des êtres-vivants et le pouvoir collectif de l’action individuelle. ©FlickrMarkShierbecker

    Agée aujourd’hui de 83 ans, Jane Goodall continue de parcourir le monde pour propager un message d’espoir sur la préservation de l’environnement et des espèces. Persuadée que chaque individu détient les clés pour conserver durablement la biodiversité, la primatologue lance en 1991, un vaste programme éducatif, humanitaire et environnemental : Roots and Shoots. Créée par et pour les enfants et adolescents, l’organisation a pour objectif de favoriser les initiatives locales et positives du monde entier à travers les jeunes générations. « L’avenir est entre les mains de nos enfants et ensemble, nous pouvons faire la différence et faire de cet endroit un monde meilleur », confiait-elle à l’occasion de la projection en avant-première du documentaire « Jane » au siège de l’UNESCO le 21 janvier dernier. 

    Par Maëlys Vésir @MVesir


    Diffusion de Jane de Brett Morgen le 11 mars prochain sur National Geographic. 

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