Chaque année en France, 550 millions de colis sont envoyés via le commerce en ligne, générant pas moins de 137 000 tonnes de déchets non recyclés. Pour limiter ce gaspillage, le concept de colis réutilisable se développe peu à peu. En 2020, l’entreprise française Hipli a lancé un emballage réutilisable pour au moins 100 allers-retours entre e-commerçants et particuliers.
17 colis sont envoyés chaque seconde en France. Et ce trafic ne fait que s’accentuer depuis le début de la crise sanitaire. Selon le dernier bilan de la Fédération e-commerce et vente à distance (FEVAD), la vente de produits sur internet a augmenté de 32% en 2020. Outre le transport, ces achats en ligne sont responsables d’une grande pollution en raison des colis qui finissent bien souvent à la poubelle. Aux Etats-Unis par exemple, l’Agence de Protection de l’Environnement a évalué que les emballages du e-commerce représentent environ 30% des déchets solides produits par les ménages.
C’est face à constat amer qu’est né Hipli au-dessus des poubelles jaunes des deux fondatrices, Anne-Sophie Raoult et Léa Got, adeptes du commerce en ligne. « J’y jetais un colis dans lequel je venais de recevoir un vêtement que j’avais choisi justement parce qu’il respectait notre planète. Et là, penchée au-dessus de ma poubelle, je n’avais pas franchement l’impression de faire un bon geste », raconte Léa Got sur le site d’Hipli.
Après divers tests de résistance, d’études auprès de logisticiens et de marques, les deux amies originaires du Havre ont alors lancé leur colis réutilisable en juillet 2020, à destination du textile dans un premier temps. En un an, 40 000 colis Hipli ont déjà circulé sur l’hexagone.
Réduction de 96% des émissions de carbone
Le principe est simple. Les commerçants en ligne achètent auprès d’Hipli les emballages réutilisables, et les proposent en option sur leur site internet aux particuliers. Si la commande ne convient pas au client (article à la mauvaise taille, ne lui plaît pas), ce dernier peut renvoyer sa commande avec l’emballage Hipli vers la marque. Et si la commande lui convient, il replie l’emballage dans une pochette intégrée écopli préaffranchie, et la dépose dans une boîte aux lettres de la Poste.
Les colis reviennent ensuite au Havre, chez le logisticien de la marque, où les emballages sont nettoyés et remis à neuf, afin de les renvoyer ensuite chez d’autres e-commerçants. Si ces trajets supplémentaires peuvent apparaître comme problématiques d’un point de vue environnemental, Anne-Sophie Raoult précise qu’ils sont effectués par la Poste, qui ne réalise les voyages qu’avec des camions pleins. Hipli estime que 20g de CO2 sont émis par renvoi. Les fondatrices souhaitent avant tout diminuer drastiquement les déchets liés au e-commerce : « Le colis a été conçu et testé pour qu’il vive cent cycles, soit de cinq à sept ans. »
Car à chaque réutilisation d’un emballage Hipli, c’est un carton de moins qui n’est ni fabriqué, ni jeté. Ce qui permettrait de réduire de 96% les émissions carbones et d’éviter 25 kilogrammes de déchets sur cent commandes. Si le tri se généralise en France et en Europe, 20% des déchets recyclables sont encore jetés dans la poubelle des tout-venants, et seulement 65% des cartons, même triés correctement, sont aujourd’hui efficacement recyclés.
Visant la réutilisation, et non la recyclabilité de ses colis, Hipli a misé sur une matière plastique, le polypropylène. Conscientes que cette matière reste polluante, Anne-Sophie Raoult et Léa Got expliquent ce choix par les contraintes de poids liées à l’envoi postal ou encore la nécessaire résistance sur le temps long de la matière. « Ce qui va faire l’impact, c’est la réutilisation réelle et nombreuse de nos emballages, donc pour ça, il faut qu’ils puissent réellement résister », insistent les deux amies, qui tiennent à rappeler qu’un « usage raisonné et raisonnable » du commerce en ligne reste indispensable. Selon leurs analyses de cycle de vie, le polypropylène aurait une moindre empreinte écologique que le carton dès la seconde utilisation du colis (moins 77% d’impact carbone sur un carton).
Depuis leur début, elles estiment leur taux de retour, quand les usagers renvoient bien leur emballage, à 90% en moyenne. Un élément essentiel de leur démarche qu’elles aimeraient encore améliorer par la suite. Une autre marque française de colis réutilisables, Opopop, propose par exemple un système de consigne digital : le consommateur doit déposer une caution pour choisir ce colis, qui est prélevée si l’emballage n’est pas renvoyé dans quinze jours suivant la livraison, ce qui permet d’améliorer le taux de retours, évalué à 95%.
180 marques
Le concept semble attirer de plus en plus de commerçants en ligne. Chaque mois, plus de vingt marques démarrent une collaboration avec Hipli. A ce jour, 180 sites proposent leurs colis réutilisables. Etant donné le coût de l’emballage, deux euros, lié au retour postal, les commerçants peuvent refacturer une partie du prix au client. D’après Anne-Sophie Raoult, 80% des marques coupent la poire en deux : un euro reste à leur charge, et le particulier paie un euro supplémentaire sur leur colis.
Après des marques textiles engagées, comme Balzac et Camif, l’entreprise française étend désormais son périmètre, en s’implantant prochainement sur des sites grand public, tels que C-Discount. La plateforme va lancer à grande échelle l’option Hipli sur tous leurs biens compatibles avec leurs emballages dès novembre 2021 se félicitent les fondatrices. L’entreprise havraise, qui compte à ce jour six salariés, mettra également à disposition des marques un colis rigide d’ici la fin de l’année, notamment pour les cosmétiques.
J’adore découvrir de nouveaux dispositifs qui sont une réelle efficacité. Hipli semble être une belle manière de repenser les emballages. Dommage que ce soit aux particulier de se charger d’acheter ce type d’emballage. Cette initiative est encore très jeune et semble très prometteuse néanmoins. J’espère que ce genre d’option pourrait être directement proposé par les entreprises de courrier tel que Laposte, pour que les gens puissent choisir d’avoir ce type d’emballage. Certaines personnes créé elle-même leurs emballages, mais cela prends du temps et n’est pas forcément très productif. Bravo à ces deux entrepreneuses pour cette idée.