Cyril Dion – Tenir le crachoir

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    Folie du monde…

    Comment faire avancer les sujets de l’écologie lorsqu’à à sa droite on se fait traiter de « Khmer vert » par les pro-technologie comme Laurent Alexandre, à sa gauche de « bonimenteur de l’écologisme subventionné » par les anti-civilisation de la Deep Green Resistance et qu’au milieu les gouvernements jouent la montre, que les mouvements portant l’écologie politique avancent en ordre divisé, que les campagnes de désinformation de grandes entreprises sèment le doute ?

    Dans un monde si fragmenté, si complexe, où nos subjectivités s’entrechoquent, nos points de vue sur la réalité, tous partiels, s’affrontent plutôt que de dialoguer, il n’a sans doute jamais eu tant besoin d’écoute et d’intelligence collective…

    Ce que le jeu médiatique, des réseaux sociaux, ne facilite pas, au combien.

    On pourrait dire que si un jour les humains disparaissent ce sera sans doute à cause de leur propension à se déchirer sans fin sur l’origine du mal et la nature des remèdes à appliquer. S’ils s’en sortent, ce sera certainement grâce à leur capacité à coopérer, à unir leurs forces et leurs intelligences.

    Mais comment y parvenir ? Comme l’écrit l’historien Yval Harari, ce qui a le pouvoir d’unir nos subjectivité, d’engager la coopération de millions de personnes ce sont des récits partagés, des fictions. Et où les récits s’écrivent-ils ? Là où se forgent les opinions communes. Aujourd’hui il s’agit principalement des médias, traditionnels et sociaux.

    Or, une nouvelle conversation y prend place, où un début de consensus se construit. Des lycéens, des étudiants, des ONG, des syndicats, des YouTubers, des artistes, des mouvements sociaux (comme les gilets jaunes), des élus locaux, des députés, s’accordent pour dire que l’urgence est là et que tous, en tant que société, nous devons agir de concert. Et en premier lieu nos Etats qui fixent les règles du vivre ensemble.

    Pourquoi nos Etats ? Parce que la fenêtre d’action que les scientifiques brossent (avoir réduit de 50% nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 10 ans) demande des mesures collectives. Aujourd’hui la majeure partie de nos émissions proviennent des transports (voiture en tête), du chauffage, de l’alimentation et du bâtiment (la construction). Organiser des réseaux de transports collectifs pour que nous n’ayons pas besoin de nos voitures relève de l’Etat et des collectivités territoriales. Faire cela et rapidement interdire les véhicules qui consomment plus de 1 ou 2L/100km, puis les véhicules thermiques, ira plus vite que d’attendre la bonne volonté de chacun qui se heurte aux contingences du quotidien. Idem pour l’isolation des logements. Idem pour la relocalisation de l’agriculture et sa sortie du pétrole. La « révolution verte » qui a transformé l’agriculture après la seconde guerre mondiale ne s’est pas faite parce que les paysans l’ont décidé tout seul ! Plus que jamais, occuper le terrain médiatique, occuper la conversation globale du monde -tenir le crachoir en somme- en soulignant l’urgence et en proposant des voies pour limiter l’effondrement, me paraît donc une action prioritaire. Nous verrons bientôt si cela porte ses fruits…

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