Mon smartphone est quantique

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    Smartphones, disques durs de poche, tablettes, écrans plats, lecteurs de DVD, appareils photo numériques, satellites de télécommunications… nos technologies de communication doivent beaucoup à Bohr, Heisenberg, Dirac : des théoriciens de génie qui, il y a un siècle, révolutionnèrent notre regard sur la matière.

    Le nouveau monde ultraconnecté dans lequel nous vivons, nous le devons – en partie – à la quantique. Après avoir compris le fonctionnement des atomes, les précurseurs de la quantique sont descendus à l’échelle en dessous. Ils ont décrypté avec une justesse inégalée le comportement des électrons et des photons : les deux particules électromagnétiques fondamentales et indissociables de toute forme d’échange d’énergie dans la matière. Ainsi ils nous ont révélé pourquoi des matériaux comme la laine, le bois, le plastique ou le coton font de bons isolants électriques, tandis que les métaux font de bons conducteurs. Pourquoi aussi d’autres matériaux montrent une conductivité intermédiaire, réglable avec une pincée d’impuretés. Les propriétés uniques de ces « semi-conducteurs » ont permis, en 1947, de concevoir le transistor, petit composant à trois électrodes devenu la brique de base de l’électronique.

    Soixante-dix ans plus tard, l’électronique est partout, aussi omniprésente que discrète. Smartphones, écrans plats, cartes à puce, radio, télévision, panneaux publicitaires, consoles de jeux… le succès et les progrès spectaculaires de l’électronique sont liés à la possibilité d’interconnecter de nombreux composants sur une puce miniature. Le mode de fabrication de ces circuits imprimés a par ailleurs permis d’en produire de plus en plus à des coûts de plus en plus faibles. Les premières puces intégraient quelques dizaines de transistors ; un microprocesseur aujourd’hui en intègre de quelques centaines de millions à plusieurs milliards, dont la taille – jusqu’à une douzaine de nanomètres – est celle des plus petits virus !

    Anatomie d’un mobile

    Ouvrons un smartphone. Sur un même circuit intégré de nombreux composants, on voit différentes puces. Celles du CPU (Central Processing Unit) et du GPU (Graphics Processing Unit) gèrent les principales opérations de mise en marche et d’affichage ; d’autres concernent les mémoires, le traitement des signaux numériques pour gérer les images et les sons, la vidéo. Le module radiofréquences rassemble, lui, des composants pour la réception, l’amplification et l’émission des signaux radio. N’oublions pas l’écran LCD (à cristaux liquides), les antennes Bluetooth, les nombreux capteurs, la carte SD… Pas un de ces modules, capables de s’éclairer au passage d’un courant électrique, de résonner et de rayonner des micro-ondes, ou encore de stocker de l’information dans l’intime de la matière, ne serait concevable sans la physique quantique. Il en va de même pour un appareil photo numérique, un capteur GPS, un ordinateur portable ou une console de jeux… soit les fonctions regroupées dans notre smartphone !

    L’électronique de demain ?

    L’extrême miniaturisation de l’électronique est confrontée à de nouveaux défis. Mais des solutions existent… encore plus quantiques, comme la spintronique. Cette électronique exploite le spin, propriété purement quantique des particules que l’on peut visualiser comme son mouvement de toupie. Conséquence : des disques durs et des mémoires toujours plus puissants et miniaturisés ! À terme, les nanotechnologies permettront de concevoir les composants et circuits à l’échelle des atomes et des molécules. Le smartphone tiendra dans un implant, dans un ongle ou sous la peau. Autre piste, les matériaux supraconducteurs, sans résistance électrique et donc sans émission de chaleur, qui permettront de cartographier les champs magnétiques ultra-faibles du cerveau ou de détecter les ondes radio parvenant du cosmos.

    Le temps de l’électronique confinant la bizarrerie quantique dans les entrailles de ses composants est révolu. William Phillips, prix Nobel de physique 1997, note que « la première révolution quantique a conduit aux appareils électroniques que nous considérons comme partie intégrante de la vie moderne. Mais elle a peu fait usage des caractéristiques les plus étranges de la mécanique quantique. Aujourd’hui, la seconde révolution quantique met en œuvre cette étrangeté. » L’ordinateur quantique est emblématique de cette seconde révolution. Dans un ordinateur classique, l’information est constituée de bits, échangée à la vitesse de l’électron ou de la lumière, et prenant une seule valeur possible : 1 ou 0. Dans un ordinateur quantique, les qubits superposent les états 0 et 1 en simultané à l’instar du chat de Schrödinger, à la fois mort et vivant (lire page 110). Ils démultiplient les puissances de calcul. Incarnés dans notre environnement, ces concepts paradoxaux et ensorcelants, bien éloignés de la logique d’exclusion binaire (vrai/faux) à laquelle nous sommes habitués, deviendront familiers et intuitifs, et achèveront d’infuser dans tous les aspects de la société.

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