Cet été, Terre & Humanisme propose des ateliers de sensibilisation à l’agroécologie

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    Engagée depuis plus de vingt ans dans la sensibilisation aux techniques agroécologiques auprès des citoyens et des agriculteurs, l’association Terre & Humanisme propose pour la première fois cet été des ateliers pratiques dans ses jardins ardéchois. Destinés aux locaux et aux vacanciers, ces stages d’une demi-journée accompagnent une envie croissante d’autosuffisance des participants, observée notamment depuis la fin du confinement. L’occasion pour Léa Ostermann de Terre et Humanisme, de revenir sur cette prise de conscience et sur les enjeux actuels de l’agroécologie. 

     

     

    Cet été, en plus de vos formations à l’année, vous proposez des stages de courte durée pour les vacanciers et les locaux ardéchois. Quelle est votre intention en sensibilisant ainsi les citoyens aux techniques agroécologiques ? 

    Chez Terre & Humanisme, nous sommes convaincus que chaque citoyen qui fait son jardin va avoir un impact à l’échelle globale. Si quelqu’un cultive son potager, il ira certainement moins consommer de produits issus de la grande distribution et prendra conscience du lien avec le monde paysan. En temps normal, on essaye de favoriser ce lien citoyen-paysan en amenant nos stagiaires sur des fermes locales, pour qu’ils voient ce qu’il s’y passe et prennent conscience de l’intérêt des circuits-courts et des AMAP.

    L’association considère être la première pierre qui mènera ensuite les citoyens vers un champ d’autres possibilités. Cette année, le fait qu’on destine nos ateliers à des vacanciers sur des temps d’une demi-journée, permet de les sensibiliser à des thématiques très précises. Cela peut intéresser des gens qui ne seraient pas forcément venus participer à nos stages longs en temps normal, et faire naître en eux une envie de se mettre au jardinage, par exemple.

     

    Concrètement, quelles techniques peuvent être mises en place par les particuliers ?

    Ce que notre association essaye de faire comprendre aux gens, c’est que l’agroécologie peut être accessible à tout le monde. Ce sont des savoir-faire et des connaissances agronomiques, mais c’est aussi beaucoup de bon sens et de savoirs traditionnels. Si la personne a déjà un petit lopin de terre, elle peut mettre en place des techniques agroécologiques en utilisant du compost, en utilisant une grelinette – un outil pour aérer le sol sans le retourner, en faisant du paillage pour protéger les plantes mises en culture, ou en utilisant des engrais verts pour ne pas laisser le sol à nu entre deux cultures nourricières, par exemple. C’est quand on met toutes ces techniques en place qu’on arrive à recréer un écosystème équilibré et harmonieux.

    Si on les enseigne en profondeur lors de « stages potagers », les ateliers de cet été permettent de se concentrer uniquement sur certains points, comme la gestion et les économies d’eau, l’aménagement de structures au jardin, la transformation des produits, la fabrication de cosmétiques écologiques, les semences, ou encore l’animation land-art au jardin. Car au-delà de toutes les techniques qu’elle englobe, l’agroécologie est aussi une éthique de vie : produire ses cosmétiques écologiques, c’est aussi de l’agroécologie dans un sens, puisqu’on va consommer moins et utiliser des produits écologiques. Ou bien, en produisant ses propres conserves, on comprend comment cultiver son jardin et transformer ce qu’on a produit pour le manger plus tard. C’est un cheminement de pensée qui amène à être plus conscient de comment fonctionne tout le système alimentaire.

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    En avril 2018, José Graziano da Silva, le Directeur général de la FAO, reconnaissait l’impact positif de l’agroécologie pour construire des systèmes alimentaires plus sains et équilibrés. Observez-vous une accélération de cette prise de conscience à la lumière de la crise que nous traversons ?

    Si à l’échelle de l’association, on remarquait déjà un intérêt grandissant pour les problématiques de l’agroécologie avant la crise sanitaire, le confinement a souligné la fragilité de nos systèmes, et l’importance de se saisir à nouveau d’une certaine autonomie alimentaire. La consultation citoyenne menée par la Croix Rouge et WWF du 10 au 25 mai dernier a montré l’intérêt des gens pour ces sujets : parmi les quatorze idées jugées prioritaires par les participants, favoriser  la consommation locale et les circuits courts, et se diriger vers une agriculture alternative sont en haut de la liste.

    Chez Terre & Humanisme, on voit aussi beaucoup de gens qui sont en plein questionnement et en potentielle reconversion professionnelle, souvent motivés par un manque de sens dans leur travail. On s’aperçoit que les citoyens ont besoin de mettre les mains dans la terre, de se reconnecter à la nature. Cela tend à se confirmer à la suite du confinement.

     

    Aujourd’hui, alors que le clivage entre agroécologie et agriculture intensive persiste, avec d’un côté, 29% d’exploitations agricoles durables à l’échelle mondiale selon l’IPBES, et de l’autre, la multiplication par neuf de l’usage d’intrants chimiques depuis 1961 selon un rapport du GIEC (août 2019), les enjeux de l’agroécologie ont-ils évolués avec la crise ? 

    L’enjeu majeur de l’agroécologie reste de changer de modèle agricole et social. Dans énormément de pays, et particulièrement ceux du Sud, l’agriculture paysanne nourrit déjà les populations avec des productions à petite échelle, sans intrants chimiques. Notre association est convaincue que ce modèle doit être diffusé au maximum, pour pouvoir abandonner petit à petit celui des grandes exploitations, néfastes sur les plans sanitaire, environnemental et social. Avec cette crise, on s’est rendu compte qu’on était très dépendants des marchés mondiaux et de la main d’œuvre étrangère. Donc, au-delà de préserver l’environnement, l’un des enjeux de l’agroécologie aujourd’hui est de parvenir à nourrir les êtres-humains et de leur rendre une certaine autonomie alimentaire, à l’échelle individuelle et territoriale.

    En 2018, plus de 60% des porteurs de projets agricoles installés n’étaient pas issus du milieu paysan. L’idée, c’est donc d’encourager la prise de conscience et d’accompagner cette transition agroécologique globale, chose que ne font pas les politiques publiques actuellement. Elles favorisent toujours les énormes exploitations, les aides à l’Etat et la politique agricole commune ne sont pas cohérentes avec une transition agroécologique.

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